vendredi 29 janvier 2010

Urbanisme commercial : une étude met en cause la LME dans la déstabilisation des équilibres territoriaux

Dans sa « note d’expert » annuelle, la fédération Procos* dresse le premier état de la libéralisation des implantations commerciales permise par la loi de modernisation de l’économie (LME) de 2008. Le constat est édifiant : en 2009, période de crise et de baisse de la consommation, dans un marché français déjà saturé, un nouveau record de volume de surfaces commerciales a été battu, avec près de 3 millions de m² de surfaces commerciales autorisés par les nouvelles Commissions Départementales d’Aménagement Commercial (CDAC) en France métropolitaine.

En prenant également en compte les projets compris dans la tranche de 300 à 1.000 m² (soumis précédemment aux Commissions Départementales d’Equipement Commercial - CDEC)[1], soit plus d’un million de m² supplémentaires, plus de 4 millions de m² de surfaces commerciales auront été produits cette année.

« Une surproduction de m² commerciaux injustifiée et anachronique »

Selon l’observatoire des projets d’ensembles commerciaux de Procos, 593 projets (soit 7.432.000 m²) sont déjà prévus pour les 5 prochaines années, ce qui place la France dans le « hit parade » des européens en matière de prolifération d’immobilier commercial. « Si le nombre de projets est pour la première fois en baisse depuis les années 1990, il se maintient à un niveau très élevé, et n’indique pas un retournement de conjoncture : cette tendance se maintiendra », estime les experts.

80 % des surfaces en projet (5.900.000 m²) concernent des opérations de périphérie dont 52 % des parcs d’activités commerciales (3.780.000 m²) et 28 % des centres commerciaux (2.120.000 m²). Les centres commerciaux de centre ville (890.000 m²) ne représentent que 12 % des surfaces en projet.

Pour Procos, « cette évolution ne suit aucune logique économique » : la consommation des ménages a chuté à + 0,9% en 2008 et + 0,7% en 2009, alors qu’elle était d’environ + 2 à 2,5% par an en moyenne jusqu’en 2007 ; le Conseil National des Centres Commerciaux (CNCC) estime à - 3,9% la baisse de fréquentation des centres commerciaux sur l’année 2009. « Cette surproduction, sans suivi de la demande, risque de créer un phénomène de « cannibalisation » des commerces, des fermetures, et donc de développement de friches commerciales », alerte Procos.

La réforme (très attendue) de l’urbanisme commercial

Pour les urbanistes de Procos, « il est urgent de redéfinir une approche stratégique des implantations commerciales car la question des équilibres territoriaux ne s’est jamais posée avec autant d’acuité. »

La Fédération Procos préconise ainsi que le volet commercial des SCOT soit renforcé et rendu obligatoire. Elle appelle notamment à « la création de nouveaux outils, pour la maîtrise foncière, le montage et le portage des opérations, afin de relever l’enjeu de la requalification des sites existants, en priorité celui des entrées de ville dégradées ».

Pour rappel, le Gouvernement s’était engagé lors de l’examen de la LME à déposer avant fin 2008 un projet de loi refondant l’urbanisme commercial et avait chargé le député Charié d’une mission en ce sens. Celui-ci, depuis disparu, avait réuni l’ensemble des acteurs du commerce pour travailler à des propositions de solutions concrètes et opérationnelles. Selon nos informations, c’est le député Patrick Ollier, président de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale, qui aurait été chargé par le gouvernement de reprendre le dossier.

> Télécharger l’étude de Procos :

> Sur le même sujet, retrouvez également le dossier spécial Urbanisme commercial, paru dans le mensuel Intercommunalités en juin 2009.



* Fédération pour l’urbanisme et le développement du commerce spécialisé



[1] Depuis la LME, tout projet commercial est soumis à une autorisation préalable, dès lors qu’il développe une surface de vente supérieure à un seuil porté de 300 m² à 1.000 m² ; en revanche, l’ouverture d’une surface inférieure à 1.000 m² est dispensée de procédure d’autorisation.